Quinzième Elévation

Cœur foyer de nouvelles grâces.

Sixième désir du Cœur Eucharistique de Jésus : être honoré comme Cœur Eucharistique

I

Réflexion. – Un foyer est le centre d’un rayon­nement de lumière et de chaleur. Lorsque d’un point jusque-là ignoré s’échappe un rayon lumineux, lorsque par exemple une étoile apparaît, une vérité se promul­gue, tout cela semble être nouveau, et pourtant il n’y a rien de nouveau sous le soleil[1].

Jésus-Christ en apportant la loi nouvelle n’en créait pas les vérités : ce que je vous dis, je ne dis pas de moi-même, mais de mon Père qui m’a envoyé[2].

Donc les étoiles, non plus que les vérités dog­matiques, ne sont nouvelles que pour arriver à leur mo­ment. Les étoiles mettent des siècles à faire parvenir leur lumière, et les vérités nouvellement proclamées ne sont que les rayons de ce foyer éternel, de cette beauté an­cienne et toujours nouvelle.

C’est ainsi que la dévotion au Cœur Eucharistique de Jésus, n’est pas nouvelle, mais splendeur de son divin objet plus explicitement montré, elle est un foyer de nouvelles grâces brillant d’un éclat nouveau, et le révélant toujours davantage, le fait aimer plus parfaitement.

II

Jésus – Voilà que je vais faire des miracles nouveaux[3], c’est-à-dire que c’est maintenant qu’ils vont paraitre : vous me connaîtrez[4], si vous entrez dans la voie que je désire.

Une des peines les plus amères de ma vie eucha­ristique a été le retardement que mes amis ont appor­té à venir consoler mon Cœur auteur de ce don. Il y a deux siècles que, découvrant ce Cœur à ma fidèle ser­vante, j’ai fait connaître ma soif si ardente d’être honoré des hommes dans le Saint-Sacrement[5], et on n’a pas tenu compte de mon désir, mon Cœur eucharistique n’a pas été reconnu hautement dans cette manifestation suréminente de mon amour envers vous.

Si je me fusse contenté des hommages rendus à mon corps sacré dans l’Eucharistie, « Corpus Christi », je n’aurais pas dit qu’il n’y avait presque personne qui s’efforçât selon mon désir de me désaltérer, usant envers moi de quelque retour, puisque j’avais des adorateurs ; mais ce culte que j’ai demandé aussi et qui m’est rendu avec tant de pompe, satisfait seulement à un premier devoir.

De même les triomphes de mon Sacré-Cœur m’ont aussi consolé de l’ingratitude des chrétiens, et cependant cette louange universelle qui me réjouit en s’adressant surtout à l’amour, aux souf­frances, aux vertus de mon état passible et mortel, me laisse toujours à désirer que mon Cœur soit honoré des hommes dans le Saint-Sacrement[6]. Telle est encore ici l’expression de mon désir extrême : « la soif ardente qui me dévore et dont je demande avec instance depuis plus de deux cents ans à être désaltéré.

Ah ! si vous m’aimez, donnez enfin à mon Cœur Eucharistique, à lui aussi, la compagnie d’un cœur ami sur la terre d’exil. Venez à ce Cœur qui vous a tant aimé et qui vous aime tant encore que, malgré vos ingratitudes, il veut demeurer avec vous et que pour cela, il a obtenu de ma puissance le plus grand, le plus inconnu des prodiges : l’institution de la sainte Eucharistie, nouvelle et sublime émanation de mon éternelle charité.

Venez vous réchauffer à ce feu rajeuni, venez à ce Cœur, lumière des cœurs, lumen cordium, glorifiez-le, vous qu’il a choisi pour le désaltérer, venez, et des grâces nouvelles inespérées, abondantes, vous seront accordées à vous, à vos maisons, à vos familles, à vos œuvres.

Je convertirai vos pécheurs, je guérirai vos malades, à mon tour je comblerai vos saints désirs ; enfin, je ferai avec vous une alliance de paix[7] ; j’oublierai vos prévarications. Je serai à l’égard d’Israël comme une rosée de printemps[8].

III

L’âme – Consolez-vous, Seigneur, vos désirs ont été entendus et votre Cœur Eucharistique a été compris. Déjà par centaines de mille les cœurs se sont ouverts à vos divins attraits et se sont réchauffés et éclairés à votre feu nouveau, et les simples et les savants, les princes de l’Eglise et les princes de la terre aussi bien que les enfants du peuple, les religieux et les hommes du monde, vous nomment et vous aiment.

Déjà les arts et la science vous exaltent, la parole et la plume vous louent, les chœurs vous chantent ; déjà beaucoup de nations parmi les plus lointaines vous bénissent en leur langue, et déjà vous aus­si vous avez tenu votre divin contrat, ô Cœur de mon Jésus ! oui, vous avez fait une alliance nouvelle avec votre peuple ; et ses enfants sont venus par milliers de toutes les parties du monde la signer.

En grand nombre aussi, ils ont reçu les bienfaits de vos promesses ; des malades rendus à la santé, de pauvres pécheurs revenus à la grâce, à l’appel de votre doux nom, se sont répandus en can­tiques d’action de grâces, et combien d’autres dans le secret n’ont pour écho que votre Cœur lui-même, seul témoin des joies qu’il prodigue !

Mais ces choses, ô aimable Cœur Eucharistique, vous les savez vous-même, pourquoi vous les dire et pourquoi vous plaignez vous encore ?

Ah! je les dis parce que mon cœur a besoin d’exalter vos magnificences et de redire toujours sans le répéter ja­mais, parce qu’ils ne sont jamais dits assez, et votre amour et notre reconnaissance; vous vous plaignez encore, ô ineffable Cœur, c’est que tout ceci est bien trop peu, hé­las ! pour la soif de votre amour; ce sont tous les cœurs que vous voudriez renfermer dans le vôtre en chaque gé­nération qui passe devant vos sacrés tabernacles ; et ces tabernacles de l’Eucharistie, vous voudriez les dresser partout, afin d’entendre répéter toujours : Loué, adoré, aimé et remercié soit à tous moments le Cœur Eucha­ristique de Jésus, dans tous les tabernacles du monde, jusqu’à la consommation des siècles!

Amen.

16e Elévation : Cœur silencieux voulant parler aux âmes


[1] Cf. Eccles. I, 10.

[2] Cf Jean VIII, 26-28.

[3] Cf. Is. XLIII, 19.

[4] Ibid.

[5] Ste Marguerite-Marie, Vie et Œuvres, édit. Gauthey, 1920, t. II, p. 680.

[6] Ste Marguerite-Marie, cf. supra.

[7] Cf. Ez. XXXIV,25.

[8] Cf. Osée XIV, 6.